Soigner ensemble en psypérinatalité
Natacha Collomb, François Poinso, Michel Dugnat (dir.)
En-tête
LES ÉDITIONS EN ACTE(S) SOUTIENNENT TOUS LES ACTEURS DE LA (PSY)PÉRINATALITÉ QUI AFFRONTENT ENSEMBLE UNE CRISE SANS PRÉCÉDENT.
La diffusion gratuite de la version numérique de l’ouvrage Soigner ensemble en psypérinatalité codirigé par Natacha Collomb, Michel Dugnat et François Poinso qui devait paraître le 27 mars 2020 n’offre pas de solutions aux problèmes spécifiques qui se posent à tous ceux qui doivent tenter de continuer en innovant à prendre soin des parents et bébés en souffrance psychique dans cette crise sanitaire sans précédent.
En proposant durant le confinement la diffusion gratuite de ce livre, nous espérons seulement contribuer à la réflexion future sur l’amélioration de l’offre de soin et du soutien social pendant les mille & un jours. L’Alliance francophone pour la santé mentale périnatale y contribue.
Nous remercions les auteurs, l’ensemble des équipes soignantes de psychiatrie et de périnatalité, et encourageons les lecteurs à découvrir la version papier du livre, dès sa publication, en n’hésitant pas à le commander à arip@wanadoo.fr, grâce au soutien du Centre hospitalier de Montfavet-Avignon et de l’ARIP.
Sommaire et ouverture
Une histoire parmi d’autres
L’histoire de la psychologie, de la psychiatrie, de la psychopathologie périnatales reste à écrire… à travers le prisme de sa pratique de psychologue en médecine périnatale, Élisabeth Darchis tire un fil d’une quarantaine d’années sur l’évolution des pratiques.
Introduction : un contexte renouvelé, un état des lieux riche de promesses…
à tenir
Partie I
De la clinique dans les dispositifs de soins conjoints (parents-bébé)
Centrée sur la clinique dyadique ou triadique, la première partie illustre déjà la grande diversité des dispositifs de soins conjoints. Les trois situations de l’USAP de Lyon (Amélie Clément, et al.) montrent que cette unité, située en suites de naissance, exerce des fonctions différentes suivant les besoins des bébés et des parents, y compris le besoin d’une éventuelle séparation, proposant une typologie de trajectoires propre à cette unité.
Ce qui est vrai pour celle-ci l’est très vraisemblablement pour les autres : le recrutement et le projet médical de chaque unité interagissent en permanence. Le très original dispositif de soins intensifs à domicile de la Roche-sur-Yon, Winni à Dom, décrit par Marie-Charlotte Bouchard-Fernandez, et al., montre comment un dispositif pionnier d’hôpital de jour se complète dans un partenariat original avec une hospitalisation à domicile de soins somatiques, et sort des dispositifs français très hospitalo-centrés. Ceci rappelle qu’au Royaume-Uni, il n’existe plus d’unités d’hospitalisation de jour comme celle qu’avait ouvert John Cox à Stoke-on-Trent dans les années 1990 : ce sont de solides équipes mobiles qui se rendent au domicile des patients sur des durées longues. La contribution bizontine de Marie Schneider et al. montre différemment l’importance de la fonction contenante : dans l’histoire complexe présentée, l’articulation entre les différentes spécialités médicales et les divers psychistes est mise à rude épreuve par les acting de Madame. On sait que la construction d’un minimum de culture commune entre les équipes de soin psychique et de soin somatique nécessite un travail en réseau personnalisé qui peut faire l’objet d’un retour d’expérience et évite ainsi pour chaque équipe comme pour le réseau formel ou informel, l’accumulation de microtraumatimes fragilisant les futures actions communes. Dans des quartiers difficiles du centre-ville de Marseille, la situation de Joséphine et de ses jumelles (Romagné et al.) raconte à la fois les articulations à l’intérieur de l’unité ambulatoire Didier Houzel, avec en particulier un groupe de psychomotricité, et entre celle-ci et une unité d’hospitalisation de semaine dont le rôle sera complémentaire du fait de la confiance entre les deux équipes. Les dispositifs de filière comme celui de Christine Rainelli et al. assurent cette coordination entre des niveaux de soins différents qu’on trouve dans quelques régions en France, et en particulier en Nouvelle-Aquitaine. Dans la filière limousine, après une amélioration du parcours de soin et donc de la prévention des psychoses puerpérales précoces, la réapparition de quelques cas interroge. Longtemps après le départ du Dr Jean-Marie Delassus et la transformation de l’unité temps plein de « maternologie » qu’il avait fondée et animée dans les Yvelines, une même équipe, opérant désormais l’hospitalisation de jour et la visite à domicile, dessine attentivement, entre dedans et dehors, l’intérêt de ce dispositif institutionnel où ce ne sont pas les TISF qui se rendent à domicile mais des professionnelles mieux entourées, mieux formées et plus contenues.
Partie II
Dispositifs interinstitutionnels
Bien que la deuxième partie traite plus en détail des dispositifs interinstitutionnels, la clinique ne manque pas dans la présentation de l’équipe Fil-à-Fil de Liège (Heidy Allegaert, et al.). Il s’agit là d’un dispositif complet intervenant en soins relationnels en cas d’hospitalisation psychiatrique à temps plein ou de jour du parent, en ambulatoire et à domicile. Plusieurs membres de l’équipe travaillent, par souci de continuité, dans ces différents lieux. On note que le travail de l’équipe est soutenu sur un mode « bickien », d’une part, et « molénatien », d’autre part. Ceci comporte le fait que les membres de l’équipe partagent une fonction de liaison avec l’ensemble des partenaires, au-delà du travail en réseau personnalisé. Autre dispositif de travail en réseau, l’extension du dispositif de soutien à la parentalité d’Aix-en-Provence, adossé au service de pédiatrie et médecine néonatale de l’hôpital général, en direction d’une capacité d’hospitalisation par mutualisation de moyens soignants dans les locaux de la néonatologie avec l’indispensable soutien du pôle de pédopsychiatrie du centre hospitalier spécialisé de Montperrin-Aix est en cours de début de réalisation grâce au FIOP (Yves Rimet, et al.). Encore un montage interinstitutionnel original avec la coordination d’une équipe d’un hôpital de jour pour adultes à Toulouse (Perrine Helias) et l’équipe de psychiatrie périnatale du service universitaire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (Ludivine Franchitto) qui offre un jour par semaine une capacité de soins de jour et un temps de parole de groupe. Les réflexions sur la dynamique institutionnelle complexe, même règlementairement, constitue un socle de construction. Ceci étant, il apparaît manifestement que l’absence à Toulouse d’un dispositif cohérent, gradué, de l’ambulatoire et de la liaison jusqu’à l’hospitalisation temps plein, demeure un scandale dans une capitale de région, même si les CHU de Grenoble, Clermont-Ferrand, Brest, Reims, Rouen et bien d’autres ne sont pas non plus équipés en la matière. Le cas clinique toulousain montre comment faire avec une femme souffrant d’une grave maladie psychiatrique dont le bébé est atteint d’une grave maladie somatique. À Clermont-Ferrand, c’est la coopération, à travers un groupe thérapeutique bimensuel mère-bébé (père accueilli par ailleurs) coanimé, dans le cadre d’une convention entre le département et le CHU, par la PMI et la pédopsychiatrie (Églantine Beaury-Pitois, et al.), qui incarne la prévention secondaire en santé mentale périnatale. Là aussi, une situation dramatique, potentiellement sidérante pour la mère comme pour les équipes, illustre la richesse des collaborations. C’est ce que rappellent également Servane Legrand et al. en montrant concrètement le rôle soignant qui peut encore être celui de la psychologue clinicienne dans certaines équipes de PMI. Force est de constater que, dans de nombreux départements, ce n’est plus d’un soin prévenant en prévention précoce qu’il s’agit, mais bien plutôt d’un rôle au service de la protection de l’enfance.
Partie III
Diverses modalités de soin
La partie III, kaléidoscopique, montre la créativité des équipes. Tel un quatuor, l’équipe de Montesson autour de Véronique Dagens évoque une situation clinique en portant l’attention sur le contretransfert et les contre-attitudes au moyen d’une narration à plusieurs voix, tentant de mettre à l’épreuve un original outil de partage des émotions. Lequel a probablement joué un autre rôle que celui qu’on attendait de lui. À l’autre bout de la palette, l’assistante sociale (Maud Gassama) et la psychomotricienne (Frédérique Joncheray-Chaar) du réseau de psychiatrie périnatale bordelais ont fait le choix de l’éducation thérapeutique en psychiatrie périnatale pour harmoniser le projet de soin de l’hospitalisation de jour et de l’hospitalisation temps plein situées dans des hôpitaux différents que les dyades fréquentent, si besoin, successivement. Un bilan, appuyé sur de nombreuses échelles, permet l’élaboration du projet de soin et la proposition d’ateliers. On sait que de nombreuses unités françaises ne font pas bénéficier les bébés et les parents de la présence d’une psychomotricienne. Peut-être du fait de son inscription dans un hôpital uniquement pédiatrique, l’unité de jour de l’HUDERF (Poncelet, et al.) offre un remarquable exemple de l’importance de la prise en compte des corps, et des émotions qui les meuvent, à travers les regards croisés de la psychomotricienne et de la pédopsychiatre sur des histoires cliniques partagées. Avec une écriture de dentelière, la marseillaise Nathalie Bonnes décrit comment l’apparemment banale l’art-thérapie qu’elle pratique fait de l’objet en fabrication un média qui va permettre au sujet de s’exprimer. Elle montre que la dimension psychique et le désir circulent dans une art-thérapie éclairée par la psychanalyse, qui travaille avec l’insu. À propos d’écriture, l’atelier la Petite fabrique d’histoires (Nathalie Aroca et Claire Capron) occupe une place entièrement à part des soins psychocorporels individuels ou groupaux de l’unité de Montfavet-Avignon, à moins que ce ne soit une place à part entière. Il propose lui aussi aux écrivantes de faire l’expérience d’une activité créatrice, sans lien direct apparent avec la relation mère-bébé.
Partie IV
Descriptions de quelques dispositifs
Entre les dispositifs interinstitutionnels de la partie II et les modalités de soin intra-institutionnelles de la partie III, la partie IV est consacrée à la description de quelques unités qui constituent en elles-mêmes des dispositifs. L’unité père-mère-bébé de Dijon (Stéphanie Dupuis et Marie Gentil) est un dispositif ambulatoire riche en temps très partiels, à l’exception de la sage-femme, Marie Gentil, qui travaille à temps plein. Cette unité assume son inscription dans un hôpital psychiatrique derrière des murs d’enceinte du 14e siècle en plein centre-ville et une activité intense dans la maternité du CHU de Dijon. L’accueil sans rendez-vous et l’ouverture aux papas la caractérisent. L’Unité parents-enfant (Anne-Valérie Linglin, et al.) du service universitaire de psychiatrie infanto-juvénile du Pr François Poinso (AP-HM) tient sans doute son originalité du fait que l’hospitalisation de semaine et l’hospitalisation de jour sont, en journée, opérées sur le même site par la même équipe. Celle-ci propose une typologie des styles de parents en début, milieu et fin de prise en charge. L’Unité Serge Lebovici à Lyon (Nathalie Elbaz et Gaspard Prunayre) consacre, elle, une journée aux femmes enceintes et quatre à des mères avec bébé, souvent patientes de psychiatrie de l’adulte du Vinatier. Elle accueille plus de 40 % de femmes schizophrènes, près de 40 % de dépressions graves et près de 20 % de femmes bipolaires. Ses médecins sont particulièrement attentifs au chaos dans les interactions mère psychotique-bébé.
Le soutien à la parentalité fait désormais l’objet d’une politique publique. L’unité toulonaise d’Yves Bernaud et al. s’en est saisi en se voyant allouer un mi-temps de sage-femme et un mi-temps de psychologue, ce qui permet une action cohérente de séances de soutien à la parentalité auprès de parents accueillis dans des structures d’hébergement social ou de placement familial du département du Var, soit sept structures cible et près de deux cent places. Spécificité de la structure d’hospitalisation parents-bébé de Liège (qui a bien failli fermer pour des raisons budgétaires), l’hospitalisation conjointe se trouve enchâssée dans une vingtaine de lits de pédopsychiatrie. Damien Lerminiaux et al. pèsent les avantages et inconvénients de cette configuration par ailleurs très ouverte aux pères.
Partie V
De la nécessité des partenariats face aux vulnérabilités multiples
La partie V commence par un chapitre crucial proposé par Nicole Garret-Gloanec et Anne-Sophie Pernel. Nicole Garret-Gloanec, forte de l’incomparable expérience clinique accumulée au Centre nantais de la parentalité, dispositif gradué, coordonné et complet, qu’elle a fondé et développé, rappelle que l’évaluation du risque pour le bébé passe par celle de l’environnement, de la relation parent-enfant, des interactions, de la parentalité, mais aussi, bien sûr, de l’observation même du bébé. Elle insiste sur un positionnement dans le champ du soin et non dans le registre éducatif. Et met l’accent sur l’exigence, sur le plan émotionnel, pour les professionnels, du travail auprès des enfants en risque de maltraitance. Dans la droite ligne de Nicole Garret-Gloanec, l’alliance entre deux hôpitaux bruxellois a été le moteur d’une fédération des îlots de bonnes pratiques concernant les femmes à grande vulnérabilité médico-psychosociale en un projet ambitieux, Born in Brussels. Les psychistes Vildan Golban, Isabelle Lambotte, Joëlle Rabinowitch et Véronique Delvenne y ont fortement plaidé pour la formation des intervenants de première ligne à une utilisation raisonnée des outils de dépistage. Elles ont insisté sur l’indispensable dimension de rencontre avec la mère ou la future mère et l’intervenant, mais aussi sur l’importance des rencontres entre intervenants, malheureusement non valorisées financièrement jusqu’alors. Toujours en région Bruxelles-Wallonie, mais dans un tout autre style, Nicolas du Bled et Alexandra d’Oultremont, partant du mythe de Léto, fille d’un Titan, présente l’institution Ulysse dédiée à l’accompagnement psychologique et social des personnes exilées en Belgique en précarité de droit au séjour. Dans ce service de santé mentale attentif à la thérapie institutionnelle, un dispositif d’accompagnement périnatal, Aïda, a été développé et ce sont les leçons de la première année de ces consultations qui sont présentées. Elles insistent sur le fait que l’épreuve de la clinique a conduit à abandonner certains présupposés de départ pour laisser aux familles le rôle actif de se saisir à leur façon du dispositif. À partir d’un parcours migratoire et traumatique, comme il y en a trop, Katell Faure et Line Cottenceau-Godet nous ramènent à Nantes dans le Home, partie la plus intensive du dispositif nantais de psypérinatalité (cf. supra). On sait que différents types de traumatismes sont présents dans près d’un quart des situations prises en charge par les unités d’hospitalisation conjointe… Mais en l’absence de ces dispositifs de soins intensifs et coûteux, le développement de services de soins de suite, comme le Vésinet, qui date du 19e siècle, et l’hôpital mère-enfant de l’Est parisien, de création récente, jouent un rôle précieux en psypérinatalité (Frédérique Rouveau, Mahalia Fadiga, Doriane Lemarchand). Le séjour y est structuré en plusieurs phases, dure en moyenne deux mois, s’adresse principalement à des femmes en situation de grand isolement social, relationnel, familial, affectif. Une équipe socio-éducative prépare le projet de sortie qui peut se faire en direction d’un centre maternel. Le suivi sur le plan psychologique est assuré par des psychologues en interne. Et en l’absence de ces services de suite, et a fortiori d’une unité d’hospitalisation conjointe, Gwenaëlle Andro, Solène Spiers, Anne Renet-Hurel et Fabien Lesclous montrent, à quatre voix, en s’appuyant sur une histoire clinique, comment les soins psychiques conjoints peuvent être apportés par une unité ambulatoire rattachée à un CHU dans un centre maternel départemental. Enfin, on ne peut que partager la conviction d’Élisabeth Chaillou que des consultations parents-bébé pluridisciplinaires pédiatre, pédopsychiatre, psychomotricien peuvent être précieuses dans le cas de grande prématurité, et surtout lorsque le bébé présente un évitement relationnel.
Partie VI
Outils d’(in)formation, formations aux outils
La partie VI, abondée par des membres du groupe « formation » du collectif des unités de soins conjoints, interroge cette question de la formation, mais aussi celle des dynamiques institutionnelles qu’elle implique, ainsi que la question des outils. En écho aux belles recherches menées à Genève dans les années 1990, qui avaient montré que la guidance interactive était une modalité de psychothérapie mère-bébé aussi efficace que les psychothérapies psychanalytiques brèves, Sandra Rusconi Serpa et al. confirment qu’en situation de traumatisme périnatal comme de trouble du spectre autistique dans la première enfance (moins de 3 ans), cette méthode est précieuse pour des familles cumulant des facteurs de risque de natures plurielles. Dans un tout autre registre, l’ensemble de l’équipe de La Frimousse, hôpital de jour trentenaire d’Alsace, avec Sarah Sananès et al., a fait le choix de se doter d’un socle commun pour une équipe en pleine transformation : celui d’une éthique lóczyenne appuyée sur le respect de l’activité autonome de l’enfant. Une attention toute piklerienne aux mouvements institutionnels a permis de les repérer à la suite de chaque moment de formation. L’aménagement de l’espace, le rythme des journées, la suppression des portiques et des tapis d’éveil au bénéfice de l’activité libre transforment en profondeur l’institution en y interrogeant habitudes et routines. À une échelle différente, les groupes bébé-parents des Ateliers Pikler comme ceux de Lyon (Maryse Chabaud, et al.) offrent un accueil insolite dans lequel des propositions parfois étonnantes pour les parents, comme celle du plat dos pour les tout-petits, l’observation partagée avec les accueillantes, l’« être avec » sont faites. S’adressant à des parents tout venant, ce dispositif ambitionne d’être un entre-deux dans le soin en psypérinatalité, attentif à préserver les ressources développementales des bébés et porté par le souhait de transmettre aux parents une conviction : celle de la liberté de mouvement comme expérience subjectivante. Une autre équipe que celle de La Frimousse s’est elle aussi formée à l’observation Pikler-Lóczy ce qui a sensibilisé ses acteurs à la clinique centrée sur le bébé ainsi qu’à la nécessité d’une réunion hebdomadaire entièrement consacrée à celui-ci et faisant l’objet d’une synthèse à partir d’une trame comportant plusieurs rubriques : celle de l’Hôpital mère-enfant de l’Est parisien (Germain Dillenseger, et al.). D’autres méthodes d’observation du bébé utilisées en psychologie du développement interactionnistes s’appuient sur la micro-analyse. Des films de Valéria Lumbroso ont ainsi servi à la fabrication d’outils novateurs de formation en présentiel, en distantiel et hybrides. Maya Gratier, Emmanuel Devouche et Drina Candilis ont veillé à leur qualité scientifique. Ces films ont pu être utilisés par ces derniers et Natacha Collomb, Ingrid Garnier et Aude Penel, tous formateurs de l’ARIP, pour proposer diverses utilisations à des professionnels en région PACA et permettre leur mise à niveau en connaissances utilisables en pratique de la psychologie du développement interactionniste. Deux dimensions essentielles s’articulent dans ces formations : éprouver, grâce aux images, les manières dont parents et bébés se connaissent et se comprennent dans une période préverbale et associer ces éprouvés avec les connaissances actuelles sur la façon dont le développement « niche » dans l’interaction. La dimension groupale de l’observation des films transforme les participants par une immersion dans la vie relationnelle des bébés et de leurs parents.Toujours avec des films, mais de nature très différente, l’objectif de Gaëlle Guernalec-Lévy avec les films Papoto et des ateliers animés à partir de ces vidéos est clairement de transmettre des informations « scientifiquement » fondées sur l’ensemble du développement à tous les parents, en particulier les plus fragiles.
Partie VII
Rechercher pour agir
La santé mentale et la psychiatrie périnatales font l’objet de recherche dont la partie VII donne un aperçu. Une revue synthétique de la cohorte française (2001-2010) de la Société Marcé francophone et du Groupe des unités mère-bébé, coanimé naguère par Nine Glangeaud, rappelle la richesse de cette étude multicentrique observationnelle et prospective qui a inclus plus de 1000 dyades hospitalisées conjointement. Les travaux ultérieurs de Florence Gressier et d’Anne-Laure Sutter y sont aussi présentés. Il faudrait retrouver dans les années à venir une ambition collective à la hauteur de ce travail qui a permis la création d’une base de données non encore exploitée exhaustivement. La contribution de Marie-Camille Genet et al. étudie finement les troubles psychiques au sein des centres maternels en les articulant avec l’évaluation des bébés suivis par les équipes PPUMMA et de l’Aubier. Cette recherche-action prouve que le service public de psychiatrie infanto-juvénile permet des travaux portant à la fois sur les dispositifs interinstitutionnels et sur l’objectivation du développement de l’enfant. Elle appelle à une extension en direction d’une recherche multicentrique. Enfin, une proposition de recherche-action, le KiT dépression/retrait, ambitionne de constituer un test de repérage précoce des douleurs intersubjectives mère-bébé. Il s’agit, en rassemblant plusieurs échelles, ADBB, EPDS, PIPE, de confier à des généralistes et à des pédiatres l’orientation des dyades vers un niveau de soin adapté (quand celui-ci existe sur le territoire, bien évidemment). Joëlle Rochette rappelle ses travaux, novateurs dans les années 2000, d’articulation entre des groupes de de parole de femmes dans les premières semaines post-partum coanimés dans les locaux de la PMI par une pédiatre et une psychologue et, par la suite, d’une activité de consultation individuelle en CMP pour celles qui le nécessitaient. L’analyse des données recueillies à l’époque et celle de 12 dyades de l’unité d’hospitalisation de semaine du service du Pr François Poinso (AP-HM) l’a conduite à un projet de recherche articulant connaissances en santé publique et en psypérinatalité, et évolution des pratiques de prévention précoce, dont elle expose les prémisses.
Partie VIII
Pour ne pas conclure
Denis Mellier propose, devant la diversité des dispositifs, d’employer le concept de contenance pour penser le travail des liens en périnatalité. Ancré dans une conception psychanalytique des notions de cadre et de dispositif, il insiste sur l’ensemble des liens qu’il s’agit de développer : entre le bébé et ses parents, le réseau primaire et le réseau secondaire. Il considère que les qualités attendues des dispositifs ne sont pas propres à la périnatalité mais à toutes les situations d’accueil des souffrances archaïques. Il conclue sur les réseaux institutionnels et sur le travail en réseau personnalisé, dans la lignée des travaux de Françoise Molénat. Il appelle à la reconnaissance de l’ensemble de dispositifs formels ou informels créés par les équipes de terrain.
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